Visiblement,
le Paris-Texas de Wim Wenders a beaucoup plu à Michael Haussman.
Un jeune homme mystérieusement sorti dun lac au milieu
des montagnes (Harrry Dean Stanton émergeait tout aussi curieusement
du désert) tente de retrouver sa petite amie qui la quitté.
Après avoir fait la connaissance dune jeune femme solitaire
à "Paris-France" (on ne peut sy tromper tant
les clichés dun Paris vrai de vrai sempilent, avec
au sommet du tas, notre Ticky Holgado national), il découvre
que celle-ci travaille dans un Peep-Show à Budapest. Soldes
dété en imitation Rhino, cette chasse ne conserve
bien entendu rien de lintelligence de la mise en scène
du réalisateur allemand (devenu depuis lami de Bono),
ni de la subtile ambiguïté des sentiments humains qui
sy entrecroisent.
Pourtant, dans la litanie estivale de ces films de fin de série,
qui font lobjet dun déstockage massif en catimini,
loin des regards dun public qui pourrait être trop regardant,
Chasse au rhinocéros à Budapest possède une caractéristique
atypique : la prétention. Evénements "bizarres"
artificiels (un nain traverse une voie ferrée, une vieille
dame a la jambe dans le plâtre, un clone de Lee Harvey Oswald
dans une chambre dhôtel, etc.), images vidéo sans
intérêt, cadrages inutilement (et pauvrement) décalés,
romance pseudo-intellectuelle, sont censés remplir un film
qui reste désespérément plat. Loin dexploser,
la grenouille nenfle pas dun centimètre.
Ces velléités esthétisantes qui aspirent à
dévoiler un univers sentimental torturé ne parviennent
même pas à en donner un semblant dillusion. Dautant
quelles reposent sur un propos étonnamment conservateur
et malodorant compte tenu des intentions clairement indépendantes
du film. Homophobie (les gays assimilés à des folles
systématiquement ridiculisées) qui réjouira les
adeptes de Pédale douce, culte de lhomme sain et simple
-notre héros finira par laisser tomber sa petite amie plongée
dans une détresse animée par des sentiments confus et
contradictoires, pour une fille qui a su mettre de côté
ces travers humains.
Mais la réelle performance du film, c'est d'avoir réussi
à dépouiller licône charismatique, voire
christique, Nick Cave, de son rayonnement naturel. Et au moins pour
ça, on lui en voudra beaucoup.
(Chronic'art,
juillet 1996)
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